L'UNESCO lance le débat sur la sécurité des journalistes
Après le lourd bilan publié par Reporters sans frontières (RSF), à propos des agressions, assassinats et kidnapping des journalistes, en 2015, ce métier peut désormais être considéré de plus en plus à risque.
Les menaces auxquelles sont confrontés les professionnels des médias sont de plus en plus nombreux. La police, les citoyens, les sympathisants des partis politiques au pouvoir et de l’opposition, les extrémistes religieux, les groupes rebelles dans les zones de conflit Irak, Syrie, DAECH…se sont tous acharnés contre les journalistes lors de l’exercice de leur métier.
Agressions physiques et morales, harcèlement, des procès en diffamation, l’intimidation des journalistes pourrait même atteindre l’assassinat, souvent restées dans l’impunité totale, elles constituent une réelle menace pour la liberté d’expression.
La reconnaissance internationale de l'impunité en tant que problème mondial, notamment par les Nations Unies constitue une étape pour remédier à ce problème. Mais elle doit également être accompagnée par une volonté politique et notamment la promulgation de textes législatifs pénalisant toute personne qui agresse d’une façon ou d’une autre les journalistes, lors de l’exercice de leur métier.
Bilan des agressions sur les journalistes de RSF, en 2015
54 journalistes professionnels dont une femme - sont otages dans le monde jusqu’au mois de décembre 2015, c'est en Syrie que le nombre de journalistes aux mains de groupes rebelles est le plus élevé (26). A lui seul, le groupe Etat islamique détient 18 d'entre eux, principalement en Syrie et en Irak.
l'augmentation du nombre de reporters otages dans le monde en 2015 a nettement augmenté, en 2015, 33 journalistes ont été enlevés au Yémen par les milices houthies et Al-Qaïda,.”
La Chine demeure, encore aujourd'hui, la première prison du monde pour les journalistes, suivi de près par l'Egypte avec 22 professionnels des médias derrière les barreaux à ce jour.
En 2015, huit journalistes ont été portés disparus. Les journalistes disparaissent majoritairement dans les zones de conflits où l'instabilité́ sur le terrain s'ajoute à la difficulté́ des enquêtes pour les retrouver. La Libye, où il est de plus en plus difficile d'obtenir des informations fiables, est le pays le plus concerné. Rappelons que nos deux journalistes tunisiens Sofiene Chourabi et Nadhir Gtari sont kidnappés en Libye et leur sort reste toujours méconnu.
Selon le bilan annuel de cette même ONG, Soixante-sept journalistes ont trouvé la mort en 2015. 27 «journalistes-citoyens» (blogueurs) et 7 collaborateurs de médias ont également été assassinés, d'après l'ONG.
En tête des pays les plus meurtriers pour les journalistes en 2015, figurent l'Irak et la Syrie, suivis par la France suite à l’attaque contre le journal satirique Charlie Hebdo en janvier 2015 , du Yémen, du Soudan du Sud, de l'Inde, du Mexique et des Philippines.
L’engagement de l’UNESCO dans la sécurité des journalistes
L’UNESCO soutient activement la sécurité des journalistes et considère qu’ils doivent pouvoir exercer leur profession dans un environnement libre de tout risque de violence et défendre le droit à la liberté d'opinion et d'expression pour tous.
Depuis 1997, le Directeur général de l’UNESCO condamne les assassinats de journalistes en suivant la Résolution 29 de la 29ème Conférence générale de l’UNESCO. Depuis 2008, le Directeur général présente un rapport biennal sur la sécurité des journalistes et les dangers de l’impunité auprès du Conseil du Programme international pour le développement de la communication (PIDC)
Plus récemment, en avril 2013, le 191ème Conseil exécutif de l’UNESCO a adopté le Plan de travail de l’UNESCO sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité.
Vendredi 5 février 2016, l’UNESCO organise au siège de l'Organisation une réunion sans précédent intitulée "Les médias se mobilisent pour la sécurité des journalistes", entre des responsables de médias venus des quatre coins du monde et des représentants des Etats membres.
Cette conférence réunissant près de 200 représentants de médias (propriétaires, dirigeants ou
journalistes) issus de médias publics, privés et communautaires allant des médias de premier plan aux journaux, en passant par les télés et radios locaux, sera l'occasion d'envisager des moyens concrets d'améliorer la sécurité des journalistes, faire reculer le nombre de victimes que compte cette profession et de lutter contre l'impunité des crimes visant des professionnels des médias.
La conférence s'articulera sur trois sessions de haut niveau, la 1ère Sécurité des journalistes – Défis, la 2ème Sécurité des journalistes – Réponses, Session 2 de haut niveau : Mettre fin ensemble à l’impunité, la session finale sera un Micro ouvert & Commentaires de clôture.
Plusieurs tables rondes seront également tenues, portant sur Les Bonnes pratiques de salles de presse, La sécurité des médias locaux, régionaux et communautaires, Sécurité des freelances et des producteurs de médias sociaux….
Malgré une amélioration relative, la liberté d’expression demeure restrictive dans la plupart des pays, et même dans les pays développés.
Le parcours reste encore long pour ancrer la culture du respect du journaliste dans l’exercice de ses fonctions. Il est donc primordial de cultiver dans les sociétés la culture de la tolérance, de l’acceptation de l’autre et de lutter contre l’extrémisme pour pouvoir atteindre l’objectif escompté et notamment le respect du journaliste et la garantie de sa sécurité. Les médias peuvent jouer un rôle important dans ce sens pour sensibiliser la société quant à l’importance de ces valeurs et changer les mentalités.